mardi 28 novembre 2017

"La biologie n'est pas une science unifiée"

Commentaire

La logique du vivant (1970) est une histoire de l'hérédité écrite par le biologiste français François Jacob (1920-2013). Elle se compose de cinq chapitres qui suivent la progression de la connaissance du vivant qui progresse par l'étude d'une série d'organisations emboîtées les unes dans les autres ("comme des poupées russes" précise Jacob), chaque structure en cachant une autre. Il distingue quatre niveaux : au XVIIe siècle, l'agencement des surfaces visibles ; au XVIIIe siècle, l'organisation qui sous-tend organes et fonctions, et qui finit par se résoudre en cellules ; au début du XXe siècle : les chromosomes et les gènes que l'on trouve dans la cellule ; au milieu du XXe siècle : la molécule d'acide nucléique déterminant la structuration de l'organisme ainsi que ses propriétés. 

Le texte ci-dessus est extrait de l'introduction de l'ouvrage qui a pour titre "Le programme". Pour François Jacob la notion de programme appliquée à l'hérédité permet à la biologie de sortir de certaines oppositions entre finalisme et mécanisme car on y retrouve deux notions associées intuitivement aux êtres vivants : la mémoire (le souvenir des parents inscrit dans l'hérédité) et le projet (le plan qui dirige la formation d'un organisme). 

lundi 27 novembre 2017

"L'une des propriétés fondamentales qui caractérisent tous les êtres vivants sans exception : celle d'être des objets doués d'un projet"

Commentaire

Le Hasard et la Nécessité (1970) est un ouvrage du biochimiste français Jacques Monod (1910-1976), contributeur du développement de la biologie moléculaire et récipiendaire du prix Nobel de médecine en 1965 (partagé avec André Lwoff et François Jacob). Son ouvrage, composé de neuf chapitres, est un essai sur la philosophie naturelle de la biologie moderne. Si Jacques Monod y affirme la compatibilité de l'existence du vivant et des raisons de son organisation avec les lois de la physique, il précise toutefois qu'elles ne sont pas déductibles de ces lois du fait qu'elles fonctionnent à partir de probabilités. Le mécanisme de reproduction des espèces fonctionne de manière à répliquer à l'identique le code génétique de l'espèce tout en aménageant une possibilité pour que des mutations surviennent aléatoirement.

Le texte ci-dessous est extrait du premier chapitre intitulé "D'étranges objets". Jacques Monod cherche à déterminer ce qui spécifie les objets naturels par rapport aux objets artificiels. Il imagine la mise au point d'un programme dont l'objectif serait d'opérer ce type de repérage à l'occasion de l'exploration d'une nouvelle planète. Après avoir montré que ce ne peut pas être les deux critères de régularité et de répétition, il envisage deux autres critères possibles : la structure et les performances (c'est-à-dire ce qu'on attend d'un objet). Si ce programme comparait au moyen de ces deux critères, par exemple, des chevaux courant dans un champ et une voiture roulant sur une route, il conclurait qu'ils sont comparables puisqu'ils servent à se déplacer et qu'ils ont une structure adaptée au type de surface qu'ils empruntent. Il en va de même lorsqu'on compare un objet naturel et un artefact, par exemple un oeil et un appareil photographique.

jeudi 23 novembre 2017

"Pour les corps vivants (...) aussi, le déterminisme existe"

Commentaire

L'Introduction à l'étude de la médecine expérimentale (1865) est un ouvrage du médecin et physiologiste français Claude Bernard (1813-1878). L'ambition du livre est de donner à la médecine une méthode qui soit pleinement scientifique, c'est-à-dire capable d'établir des lois déterminées au moyen de l'expérimentation. Pour cela, elle doit considérer les phénomènes vivants comme des phénomènes physico-chimiques et procéder rationnellement en cherchant à rapprocher les faits et les théories afin de les vérifier. Trois phases comptent : l'observation d'un fait, l'hypothèse qui l'explique puis l'expérience visant à la vérifier dans des conditions contrôlées par le chercheur. 

Le texte ci-dessous est extrait de la deuxième partie de l'Introduction. Dans la première partie, Claude Bernard s'intéresse au raisonnement expérimental et insiste notamment sur le rôle de l'observation dans l'expérience ainsi que sur la nécessité du doute que doit entretenir le chercheur afin de préserver sa liberté d'esprit. Il en vient, au début de la deuxième partie, à l'expérimentation chez les êtres vivants. Les corps vivants disposent en effet d'une spontanéité, c'est-à-dire d'une capacité à s'affranchir de la causalité physique et à se déterminer par eux-mêmes. Il cherche à montrer pourquoi cette conception du vivant ne s'oppose pas à la mise en pratique d'une méthode expérimentale.

mardi 21 novembre 2017

"Un être organisé n'est donc pas simplement une machine"

Commentaire

La Critique de la faculté de juger (1790) vient compléter les deux premières Critiques écrites par Emmanuel Kant (1724-1804), la Critique de raison pure et la Critique de la raison pratique. La Critique de la raison pure concernait notre faculté de connaître et la Critique de la raison pratique notre faculté de désirer et de vouloir. La troisième critique s'intéresse à notre faculté de juger selon le sentiment de plaisir. Elle comprend deux parties : la première traite du jugement esthétique dans l'art et la seconde du jugement téléologique dans la nature. Dans les deux cas, il s'agit de comprendre ce que l'artiste ou la nature ont cherché à faire (bien que nous ne puissions jamais le savoir) et donc de s'intéresser à la finalité. 

Le texte ci-dessous est extrait de la seconde partie portant sur la critique de la faculté de juger téléologique et, plus précisément, du paragraphe 65. Dans les paragraphes précédents, Kant a montré que les jugements sur la finalité de la nature ne pouvaient pas être tenus pour objectifs, absolus et scientifiques (par exemple, on ne peut pas dire que la neige a objectivement pour fin de protéger les semailles). Cependant, par analogie, il est possible de faire comme si c'était le cas pour compléter les lois de la causalité lorsque l'on considère la finalité interne d'un être vivant (par exemple, un arbre en produit un autre en tant qu'espèce : la finalité de l'arbre est la reproduction de l'arbre).

samedi 18 novembre 2017

"Le corps n'est autre chose qu'une statue ou machine de terre"

Commentaire

Le Traité de l'homme (1662) n'a pas été publié du vivant de Descartes (1596-1650). Il se place à la suite d'un premier traité, le Traité du monde et de la lumière (1664), dans lequel Descartes critique les principes fondamentaux de la physique scolastique, développée au Moyen Age, notamment par Thomas d'Aquin, et qui emprunte de nombreux concepts à la philosophie d'Aristote. Descartes y affirme la thèse de l'héliocentrisme (le soleil est au centre de l'univers), hypothèse contraire au géocentrisme (la terre est au centre de l'univers) admis à l'époque, qui valu d'ailleurs à Galilée une condamnation, ce qui détermina Descartes à différer la publication de ses ouvrages. 

Le texte ci-dessous constitue les premières lignes du Traité de l'homme. Descartes tire les conséquences de sa vision mécaniste du monde pour ce qui concerne l'étude du corps vivant. Il estime que les fonctions corporelles (circulation du sang, respiration, motricité) peuvent s'expliquer par des raisonnements mécanistes, c'est-à-dire au moyen de causes efficientes ou des propriétés physico-chimiques. Cette explication mécaniste des phénomènes vitaux se distingue des thèses finalistes (la nature ne fait rien en vain) et vitalistes (l'âme est le principe vital du corps) avancées par Aristote et réaffirmées par la scolastique. 

vendredi 17 novembre 2017

"Ce n'est pas le hasard, mais la finalité qui règne dans les oeuvres de la nature"

Commentaire

Le Traité sur les parties des animaux (330 av. J.-C.) est un traité  de biologie composé de quatre livre que l'on doit à Aristote (384-322 av. J.-C.). Il classifie les animaux et critique les positions antiques, notamment platoniciennes, concernant l'étude du vivant. Il établit que la nature agit en cherchant à équilibrer les forces et les faiblesses de chaque espèce afin que l'une ne prenne pas l'ascendant sur l'autre. Cette conception est fixiste, c'est-à-dire non-évolutionniste : le cadre naturel est posé une fois pour toute. Sur le plan anatomique toutefois, les observations d'Aristote sont souvent pertinentes.

Le texte ci-dessous est tiré du chapitre V du premier livre. Dans les quatre chapitres qui précèdent, Aristote présente sa méthode de classification des espèces qui consiste à procéder par la voie de la catégorisation par genre et non pas par division comme le préconise Platon, car cela ne permet pas de descendre jusqu'aux individus et conduit à séparer des animaux semblables pour les mettre avec des dissemblables. Dans le chapitre V, Aristote commence par distinguer deux types d'être : ceux qui sont impérissables et ceux qui naissent puis périssent. C'est dans ce dernier type que se classe le vivant (plantes et animaux), qu'il nous est plus aisé à connaître puisque nous vivons dans leur proximité. Il en vient ainsi à considérer pourquoi cette étude du vivant ne doit négliger aucun détail, aussi peu relevé soit-il. 

samedi 11 novembre 2017

“La monnaie est devenue une sorte de substitut du besoin et cela par convention”

Commentaire

L'Ethique à Nicomaque est une oeuvre d'Aristote (384-322 av. J.-C.) traitant de questions morales. Après avoir énoncé que le bonheur comme contemplation était le souverain bien (livre I), Aristote s'intéresse à la vertu qu'il définit comme juste mesure (livre II) puis livre diverses analyses de celle-ci (III, IV). Il s'intéresse ensuite à la justice (livre V), aux vertus intellectuelles (VI), à l'intempérance et aux plaisirs (VII), à l'amitié (VIII, IX) et termine par des considérations sur la vie contemplative, laquelle jouit d'une place prééminente dans sa morale (livre X). 

Le texte ci-dessous est extrait du livre V consacré au thème de la justice. Au début du chapitre VIII, Aristote analyse la justice dans les échanges. Il remarque alors que c'est l'idée de réciprocité qui domine, une réciprocité qui n'est pas définie par une égalité stricte, mais par une égalité proportionnelle. En effet, l'échange consiste à échanger des produits qui sont qualitativement et quantitativement différents. Comment alors trouver une commune mesure qui permettent à chaque contractant d'avoir le sentiment que l'échange réalisé est juste ? 

vendredi 10 novembre 2017

"Plus nous gagnons sur la jouissance, plus le bonheur s'éloigne de nous"

Commentaire

L'Emile ou De l'éducation (1762) est un traité sur l'éducation que l'on doit au philosophe Jean-Jacques Rousseau (1712-1778). Il est composé de cinq livres correspondant chacun à un âge de la vie : le nourrisson, l'âge de la nature (2 à 12 ans), l'âge de de la force (12 à 15 ans), la puberté (15 à 20 ans) et l'adulte. Rousseau défend l'idée d'une éducation négative, c'est-à-dire qui soit plus soucieuse de la protection de l'enfant contre le vice, plutôt que de l'instruction. Il estime qu'il vaut mieux ne rien faire et recommande de laisser agir la nature. L'éducation doit être faite par les choses plutôt que par les livres (afin que l'enfant s'aperçoive de la nécessité à l'oeuvre dans la nature). Elle doit éviter les punitions pour les remplacer par des sanctions naturelles (si l'enfant casse un carreau de sa chambre, on le laisse avoir froid). 


Le texte ci-dessous est extrait du deuxième livre intitulé "L'âge de nature". Auparavant, Rousseau a posé comme précepte moral que toute éducation se doit de considérer "l'homme dans l'homme, et l'enfant dans l'enfant". Il critique l'éducation barbare qui consiste à sacrifier le présent de l'enfant en vue d'un avenir incertain, de le considérer comme un esclave en lui promettant un bonheur futur, de lui imposer des devoirs qui ne lui serviront peut-être de rien. Il invite ainsi les éducateurs à faire preuve davantage d'humanité et d'aimer l'enfance pour elle-même car elle est une période rare où règnent le rire et l'insouciance. Il convient donc de ne pas traiter l'enfant comme un futur adulte, mais de considérer sa place en tant que telle. C'est ainsi que Rousseau en vient à se demander comment parvient-ton bonheur. 

mercredi 8 novembre 2017

"Il vaut mieux être moins gai et avoir plus de connaissance"

Commentaire

Les Lettres à Elisabeth (1643 à 1649) sont un ensemble épistolaire qui retrace les échanges de correspondance entre René Descartes (1596-1650) et Elisabeth, princesse palatine, fille aînée de Frédéric V et Elisabeth Stuart, brièvement, souverains de Bohême. Elles ont pour principal objet le thème de l'union de l'âme et du corps et peuvent donc être lues comme le pendant aux Passions de l'âme (1649). Elles portent également sur des questions morales, non sous la forme d'un exposé systématique, mais par une série de remarques étayées, souvent personnelles, soucieuses des nécessités de la vie et conformes aux idéaux de sagesse de l'époque. 

La Lettre à Elisabeth du 6 octobre 1645, dont est extrait le texte ci-dessous, traite plus particulièrement de la question du bonheur et de la vérité. La question que se pose Descartes est de savoir s'il est préférable d'être joyeux dans l'ignorance ou triste dans la connaissance. Sa réponse ici est que la connaissance est préférable (mais à l'article 142 des Passions de l'âme, il affirme l'inverse : "souvent une fausse joie vaut mieux qu'une tristesse dont la cause est vraie"). Pour démontrer sa thèse, il opère une série de distinctions, notamment entre le souverain bien et le plaisir qu'il apporte, les joies superficielles et celles qui sont profondes, le bonheur (qui dépend de la fortune) et la béatitude (qui dépend de notre libre arbitre). 

"Le bois dont l’homme est fait est si courbe qu’on ne peut rien y tailler de tout à fait droit"


Commentaire

L'Idée d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique (1784) est un article en neuf propositions d'Emmanuel Kant (1724-1804) qui cherche à déterminer si l'on peut entrevoir un fil conducteur à l'histoire humaine selon un plan déterminé de la nature. Pour Kant, c'est le cas : il estime que la nature ruse en oeuvrant selon un plan caché de manière à favoriser l'avènement d'une société des nations dont l'objectif sera de maintenir la paix entre les peuples. 

Le texte ci-dessous est extrait de la VIe proposition où Kant écrit que le dernier grand problème que l'homme résoudra est celui du moyen d'atteindre une société civile administrant le droit universellement, c'est-à-dire d'une manière qui soit égale pour tous. Il affirme que les hommes sont par nature ingouvernables. Etant naturellement poussés à suivre leurs penchants égoïstes, ils ont toujours tendance à rechercher des privilèges ou des moyens d'échapper à la loi. Pour régler ce problème, il faudrait instituer un maître. Problème : il n'existe pas de maître capable d'être à la fois homme et juste par lui-même. Néanmoins, le but de la nature reste le progrès infini de l'homme par le droit. 

"C'est dans les mots que nous pensons"

Commentaire

L'Encyclopédie des sciences philosophiques en abrégé (1817 pour la première édition, mais 1830 pour l'édition définitive) fournit au lecteur de Hegel (1770-1831) le fil conducteur de sa philosophie. Elle reprend, de façon synthétique, chaque étape de sa pensée qui se déploie en trois parties : la logique (être, essence, concept), la philosophie de la nature et la philosophie de l'esprit. L'ambition de Hegel est de faire de la philosophie une science au même titre que les sciences positives. Ainsi le déploiement de cette oeuvre se fait selon un ordre nécessaire et dans une volonté d'absolu, conformément à la fin que poursuit la science philosophique, qui progresse méthodiquement dans sa conquête du savoir. 

Le texte ci-dessous est extrait du troisième moment de cette encyclopédie, à savoir celui de la philosophie de l'esprit. Ce troisième moment constitue l'achèvement du système hégélien, c'est-à-dire à la fois sa fin, son terme et son accomplissement. C'est à la fin de ce troisième moment qu'il évoque l'idée que le langage est l'expression nécessaire de la pensée. Sa thèse est, en effet, que la pensée habite dans les mots, qu'elle ne peut pas s'exprimer ou s'objectiver en dehors du langage. Autrement dit, le langage n'est pas qu'un moyen (parmi de nombreux autres possibles) de la pensée, il est son seul support possible.

lundi 6 novembre 2017

Cours - L'histoire

Introduction

"Il était une fois". Ainsi commencent les histoires qui sont racontées aux enfants pour les endormir. Ces contes, qui ont pour objectif de distraire, de rassurer, parfois même d'éduquer, n'ont assurément pas le souci de la vérité, ni même celui de la vraisemblance. Pourtant, "histoire" vient du grec historia qui signifie "enquête" et l'histôr est "le témoin, celui qui a vu". Il semble donc que le lien entre la vérité et l'histoire soit beaucoup plus intime que ce que pourrait laisser penser son sens le plus large. Il est notable d'ailleurs que, bien souvent, les contes plongent leurs racines dans un passé légendaire ou mythologique, c'est-à-dire dans un univers certes fictif mais néanmoins possible.

En outre, l'histoire est cette discipline qui est enseignée à l'école. Chaque petit Français apprend au cours de sa scolarité, l'histoire de France : les grandes dates qui ont compté pour la constitution de cette nation, les grands héros historiques qui l'ont façonnée et la manière dont elle s'est progressivement construite pour devenir la République que l'on connaît aujourd'hui. Pour autant, cette histoire est souvent l'objet de critiques. Certains voient en elle un simple moyen d'édifier le peuple, de lui inculquer une conscience historique nationale, c'est-à-dire une façon propre de se rapporter à son passé collectif (on pense par exemple à l'expression typique du roman national : "nos ancêtres les Gaulois") et mettent en doute son caractère scientifique.

samedi 4 novembre 2017

"Nous attendons de l'historien une certaine qualité de subjectivité"

Commentaire

Histoire et vérité (1955) est un recueil rassemblant onze études du philosophe Paul Ricoeur (1913-2005). Ces études sont regroupées dans deux grandes parties : la première est consacrée à la vérité dans la connaissance de l'histoire et la seconde à la vérité dans l'action historique. La première est d'ordre méthodologique et la seconde éthique.  

Le texte ci-dessous se trouve au tout début de la première partie, dans la première étude intitulée "Objectivité et subjectivité en histoire". Ricoeur s'intéresse à l'exigence d'objectivité du métier d'historien et se demande si l'histoire peut se prêter à une connaissance en vérité selon les règles de la pensée objective mise en oeuvre dans les sciences. Pour répondre, il repère trois attendus à propos des sciences historiques : une certaine objectivité de l’histoire, la subjectivité impliquée de l'historien et le développement, chez le lecteur, d'une subjectivité de haut rang. Il pense ainsi l'histoire comme un tout comprenant la discipline scientifique elle-même, l'historien mais aussi le récepteur, à savoir le lecteur. 

vendredi 3 novembre 2017

"La plupart des erreurs viennent de ce que nous n'appliquons pas convenablement les noms des choses"

Commentaire

L'Ethique (1677) est l'ouvrage de Spinoza (1632-1677) le plus connu et le plus important. Ecrite selon l'ordre de démonstration propre aux géomètres, elle est composée de plusieurs définitions, axiomes, propositions et autres scolies qui sont des remarques complémentaires aux propositions. L'objectif de l'oeuvre est de permettre à l'homme de connaître les causes de sa servitude vis-à-vis des affects et d'en déduire les moyens de parvenir à la liberté et à la béatitude. Le cheminement de sa pensée prend Dieu comme point de départ (I : "De Dieu"), se poursuit par la définition de la nature de l'âme (II) puis de celle des passions (III), continue par l'analyse de leur force (IV) et s'achève sur la liberté (V).   

Le texte ci-dessous est un scolie de la Proposition 47 tirée de la Deuxième partie de l'Ethique : "De la nature et de l'origine de l'âme". Dans cette proposition, Spinoza affirme que l'homme peut avoir une connaissance adéquate de l'essence de Dieu. La seconde partie de son commentaire revient sur l'origine des erreurs et des controverses entre les hommes. Une grande partie des erreurs viendraient d'une mauvaise application des noms sur les choses, mais surtout d'un manque d'égard à la pensée d'autrui et aux erreurs d'interprétation qui en découlent. Contre ces erreurs, Spinoza en appelle à une attention plus grande aux choses et affirme l'unité de la pensée.